
Auditorium virtuel Claude Ballif
Diplômé de l'Ordre de la Grande Gidouille
Erik Satie, pataphysicien


Ubu roi est une pièce de théâtre d'Alfred Jarry en cinq actes, publiée le 25 avril 1895. Le personnage d'Ubu est inspiré de monsieur Hébert, professeur de physique au lycée de Rennes où Alfred Jarry a étudié. Il représentait pour ses élèves l'incarnation même du grotesque.

Considéré comme précurseur du mouvement surréaliste et du théâtre de l'absurde, Jarry mêle en permanence provocation, absurde, satire, parodie et humour gras. Alfred Jarry et Erik Satie se seraient rencontrés à la Rose-Croix par l'entremise de Fargue un ami commun.
Jarry a illustré "Mémoire d'un amnésique"
"la pataphysique, c’est la science des solutions imaginaires".
Illustrée par Alfred Jarry dans l’admirable personne du Docteur Faustroll (Gestes et opinions du docteur Faustroll).
Ou comment par exemple expliquer Dieu à travers une série d’équations dont l’inconnue, le Tout-Puissant, serait égale à 0.
Les pataphysiciens ont également développé une théorie alternative de la gravité, fascinante dans son absurdité. Ainsi tout corps en mouvement ne serait pas attiré par un centre de gravité. A l’inverse, ce phénomène s’expliquerait par une ascension du vide vers une périphérie. Ces savants fous sont même à l’origine de l’invention du plus insolite des alphabets : le braille plat, que ni les aveugles ni les voyants ne peuvent lire puisqu’il est invisible !
La vie d’un pataphysicien n’est pas basée sur la norme, mais sur l’exception
La pataphysique s’intéresse à l’accident, c’est l’erreur de la nature qui fait loi. Un concept qui permet de penser le monde autrement, un contrepied total à la science classique, comme l’est le théâtre de l’absurde de Jarry pour l’art dramatique conventionnel.
La pataphysique, une façon de détourner nos esprits de la pensée unique, s’apparente pour la plupart à une farce dénuée de toute logique. Une science irrationnelle, et pourtant ! Comme toute science, la pataphysique a ses maîtres, ses adeptes et ses théorèmes.
Français à la base, le concept a fait des émules partout dans le monde : Argentine, Italie, Tchécoslovaquie, Angleterre, Etats-Unis, Pays-Bas, les annexes internationales pullulent. De grands noms sont sortis diplômés de cet étrange collège : Boris Vian, Erik Satie et Joan Miro , pour ne citer qu’eux.
Un collège de pataphysique est ainsi créé en 1948, dirigé de mains de maîtres par ses provéditeurs et autres satrapes ! Les diplômes décernés sont les gidouilles, titres honorifiques en forme de spirale. Une récompense souvent flatteuse, mais parfois ironique. Ainsi l’ancienne astronaute Claudie Haigneré s’est vue décerner le prix de « gidouille la plus éloignée du système solaire » !
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Fermé en 1975, le collège sera réhabilité en 2000 et n’a pas fermé ses portes depuis. Il a su s’adapter à notre époque et c’est tout naturellement que cet établissement pas comme les autres a son site Internet . Sur une page d’accueil minimaliste, au fond vert fluo hideux, on peut lire la présentation du collège, s’inscrire ou régler la phynance annuelle. Il est même possible d’entrer en contact avec le cyberdataire. Merdre alors ! Derrière cette théorie bon enfant se cache désormais un concept marketing bien rodé. Ce serait oublier la monstrueuse cupidité de l’icône du mouvement, l’infâme Père Ubu !
Le vrai pataphysicien ne doit pas se prendre soi-même au sérieux.
Cette conception unique de l’univers trouvera son illustration la plus drôlement évocatrice à travers le cultissime dessin animé Les Shadoks . Une étrange peuplade qui passe son temps à construire des machines inutiles qui ne fonctionnent pas. Étranges oiseaux eux aussi, les pataphysiciens de toutes époques s’efforcent d’expliquer ce qui ne sert à rien, allant même jusqu’à théoriser leur propre raison d’être.

Critique, dessinateur, poète et musicien, Robert Caby est l'auteur d'un grand nombre de mélodies sur des poèmes de Guillaume Apollinaire, mais aussi de Paul Éluard ou de Jacques Prévert. Disciple et ami d'Erik Satie, qu'il visitait quotidiennement à l'hôpital Saint-Joseph, à Paris, avant son décès en juillet 1925, il passa sa vie à préserver et à révéler la richesse de l'œuvre laissée par le compositeur.
Robert Caby édita notamment certains inédits de Satie, dont les fameuses 4e, 5e et 6e Gnossiennes , et fut l'orchestrateur de plusieurs de ses pièces pour piano. Il rédigea également de nombreuses critiques musicales pour les journaux quotidiens L'Humanité ou Le Monde .

"​​​Pour écrire mes "Pièces froides", je me suis servi d’un c(k)aléidophone-enregistreur. Cela prit sept minutes. J’appelai mon domestique pour les lui faire entendre".​​
Satie vivait en Absurdie, ce qui lui valut d'être diplômé (à titre posthume) du collège de pataphysique
Le kaléidophone a été inventé par Charles Wheatstone, qui a publié un compte rendu de l'appareil en 1827. Le nom "kaléidophone" est dérivé du kaléidoscope, un jouet optique inventé en 1817 par David Brewster. (C'est la partition de "Pièces froides" qui a été placée dans notre kaléidoscope digital ci-dessus).
Le photomètre de Wheatstone a probablement été suggéré par cet appareil. Le photomètre permet de comparer deux lumières par la luminosité relative de leurs réflexions dans une perle argentée, qui décrit une ellipse étroite, de manière à dessiner les taches en lignes parallèles.
Il existe plusieurs versions différentes du kaléidophone, mais dans tous les cas, au moins une tige fine est fixée à une extrémité et une perle brillante est fixée à l'autre extrémité de la tige. Lorsque la tige vibre, le point décrit dans l'air des courbes de Lissajous , comme une étincelle tourbillonnant dans l'obscurité.



Le Phonoscope est le nom de plusieurs dispositifs inventés par Georges Demenÿ pour reproduire le mouvement par l'image.
Ce GIF animé est tiré d'une planche de 20 photogrammes de Demenÿ, en 1891, celui-ci prononçant "Je vous aime".
"L'avenir remplacera la photographie immobile figée dans son cadre, par le portrait animé auquel on pourra, en un tour de roue, rendre la vie. On conservera l'expression de la physionomie comme on conservera la voix dans le phonographe. On pourra même ajouter ce dernier au phonoscope pour compléter l'illusion..." prophétisait Georges Demenÿ en 1890.
Tout le monde vous dira que je ne suis pas un musicien. C’est juste.
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Dès le début de ma carrière, je me suis, de suite, classé parmi les phonométrographes. Mes travaux sont de la pure phonométrique. Que l’on prenne le "Fils des Étoiles" ou les "Morceaux en forme de poire", "En habit de cheval" ou les " Sarabandes", on perçoit qu’aucune idée musicale n’a présidé à la création de ces œuvres. C’est la pensée scientifique qui domine.
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Du reste, j’ai plus de plaisir à mesurer un son que je n’en ai à l’entendre. Le phonomètre à main, je travaille joyeusement et sûrement. Que n’ai-je pesé ou mesuré ? Tout de Beethoven, tout de Verdi, etc. C’est très curieux.
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La première fois que je me servis d’un phonoscope, j’examinai un si bémol de moyenne grosseur. Je n’ai, je vous assure, jamais vu chose plus répugnante. J’appelai mon domestique pour le lui faire voir.
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Au phono-peseur un fa dièse ordinaire, très commun, atteignit 93 kilogrammes. Il émanait d’un fort gros ténor dont je pris le poids.
Connaissez-vous le nettoyage des sons ? C’est assez sale. Le filage est plus propre ; savoir classer est très minutieux et demande une bonne vue. Ici, nous sommes dans la phonotechnique.
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Quant aux explosions sonores, souvent si désagréables, le coton, fixé dans les oreilles, les atténue, pour soi, convenablement. Ici, nous sommes dans la pyrophonie.
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Pour écrire mes "Pièces froides", je me suis servi d’un caléidophone-enregistreur. Cela prit sept minutes. J’appelai mon domestique pour les lui faire entendre.
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Je crois pouvoir dire que la phonologie est supérieure à la musique. C’est plus varié. Le rendement pécuniaire est plus grand. Je lui dois ma fortune.
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En tout cas, au motodynamophone, un phonométreur médiocrement exercé peut, facilement, noter plus de sons que ne le fera le plus habile musicien, dans le même temps, avec le même effort. C’est grâce à cela que j’ai tant écrit.
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L’avenir est donc à la philophonie.
Erik Satie est un digne pataphysicien, dans le sens ou la pataphysique induit l’humour, mais dans un sens désespéré, et dénué de référence à quelque transcendance que ce soit.